Réseaux sociaux: pourquoi la France est à la traine…

Le club est une tradition anglo-saxonne. Elle est connue, et tout anglo-saxon, se doit ou rêve d’y appartenir. Club privé, Country club, Phi Zeta Kappa, tout étudiant, tout salarié, tous veulent et parfois doivent en faire partie. Les principaux clubs de services (Rotary, Lyons…) trouvent leurs origines dans ces pays. En France, tout a été balayé en 1789. Et à partir de cette époque, la culture du secret des confréries existantes s’est encore renforcée, une question de survie. Être maçon ou même compagnon, était suspect. Et la suspicion coutait la vie. Alors ce type d’organisation ont continué leur développement, mais dans l’ombre. En faisant suffisamment de lobbying pour faire croire au bon peuple qu’elles n’existaient pas ou plus. D’ailleurs la loi les interdisaient parfois, et en France le respect de la loi, c’est dogmatique. Mais la plus grande ruse du démon consiste à faire douter de son existence (Baudelaire); et c’est ainsi que de vrais réseaux existent, que leurs membres élèvent leur enfants et les leurs dans la conscience de ces réseaux, mais aussi dans la nécessité de ne pas communiquer sur le sujet. Et même si l’on se doute que les membres d’un même corps (X, Centrale, Ponts, Mines, HEC, ENA), doivent sûrement garder des contacts, l’immense majorité de la population s’imagine qu’ils sont superficiels. Tout en étant persuadés d’une vaste collusion des puissants. Mais toujours dans l’incertitude. La ruse du démon. Ainsi, alors que chez nos voisins le réseau est une fin en soi, un but à atteindre, un acte d’appartenance, chez nous, il se doit d’être feutré, voire non-dit. Corollaire, l’appartenance devient un privilège, et selon le vieil adage français « les privilèges ne valent que parce qu’ils ne sont pas partagés ». En France, l’émergence des ONG dans les médias, ont incités certains français à développer un mode de réseau social. Mais même si les médias s’en font écho, trop peu de français prennent la vraie mesure des réseaux qui les entourent. D’ailleurs, si tous ont déjà entendu, à propos d’un homme politique, ou d’un capitaine d’industrie la fameuse phrase « il a activé ses réseaux », bien peu sont capables d’en mesurer l’ampleur. Certains magazines (Capital…) font régulièrement des papiers sur les interactions (réseaux) entre un leader, et son entourage professionnel, ses anciens camarades de classe, ses appuis familiaux ou politiques. Autre paramètre important, la notion de communautés ethnoculturelles est gommée en France, alors qu’elles sont un élément fort de réseau social dans les pays anglo-saxons. Le démon n’aime pas la concurrence. Enfin…

réseau

Depuis quelques années, avec la généralisation de l’internet domestique, se sont développés les réseaux sociaux électroniques (Social Networking – SN). LinkedIn est le plus emblématique, pour les professionnels, et MySpace le plus actif pour les particuliers. Deux outils francophones sont disponibles: 6nergies, et Viaduc. Et comme de bien entendu, là ou les outils SN étrangers sont pleinement opérationnels, conviviaux, et destinés à faire du « business développement », leurs homologues français sont élitistes, pleins de non-dits et de contraintes sociales, souvent inventées ou adaptées a ce nouveau support! Bien sûr, ce n’est pas le fait de leurs créateurs (souvent réseauteurs de formation, de cursus, ou de culture), mais bien le reflet de ce que la société française a de pire. En effet, le SN, c’est la vraie vie, mais en (beaucoup) plus rapide. Les gentils sont très gentils, les mesquins très mesquins. Et comme le français (hors réseauteur atavique), est très individualiste, et relativement égoïste, il veut bien exploiter l’outil à ses propres fins, mais n’autorise pas les autres à le faire. Il ne lit ni les règles, ni les modes d’emploi, il improvise un mode de comportement idéal lui convenant, et l’impose aux autres membres. Il y a donc une réelle difficulté à créer un réseau fiable, même en dehors de toute considération de Dunbar, et à obtenir une participation active de ses contacts.

Plusieurs écueils empêchent la création de cercles vertueux autour du SN en France, sur des outils français, bien que les français présents sur les SN étrangers soient étonnamment conciliants et performants:

  1. l’aspect statutaire du SN; comme autrefois la clef des toilettes des cadres, l’accès au SN par la plèbe est souvent mal supporté par l’élite. Bien sûr, pas l’élite dirigeante, ou influençante, mais celle autoproclamée du middle-management, du pouvoir hiérarchique. Sans légitimité, cette vision statutaire du SN a un pouvoir de nuisance réel, dans le blocage du système.
  2. l’aspect auto-communication du SN; comme un diplôme ou une qualification, on proclame son appartenance à un SN, que l’on brandit comme un drapeau. D’où un ostracisme parfois puissant envers ceux qui ne le considèrent comme un outil.
  3. l’aspect revanche ethno-politico-sociale: le membre ne transfère pas de demandes provenant de quelqu’un ou transitant par quelqu’un ne lui convenant pas, sans laisser le choix au destinataire.
  4. l’aspect « pétri de certitudes »: bien que n’ayant pas lu le mode d’emploi de l’outil, le membre du SN impose ses propres règles souvent non dites, et d’autant plus violemment qu’il se croit protégé par un relatif anonymat, et qu’il est prêt à les enfreindre.
  5. l’attitude de l’éditeur de l’outil en matière de communication sur les règles et bonnes pratiques en usage: la modération non formalisée, très généraliste, produisant parfois un sentiment soit d’injustice, soit de laxisme, selon l’endroit on se trouve le membre, les décisions péremptoires, immédiates, rarement justifiées, et documentées. Le meilleur exemple est l’absence d’une rubrique indiquant clairement, dès la connexion, la liste des bonnes et mauvaises pratiques, ou si cette liste existe, son absence totale d’évolution au fil du temps, alors que de nouvelles pratiques ont dû apparaitre au fil des évolutions et des usages.

Il y en a d’autres, mais ces cinq écueils sont quand même des freins assez importants au développement. Un autre élément, non négligeable, est la valorisation du service. Habitué à avoir un service public gratuit (parce que non conscient de l’énormité de son coût réel, caché), mais de piètre qualité, et ne pouvant intervenir sur l’amélioration de cette qualité, le français trouve peu tolérable de payer pour un service privé, même de qualité. Il ne souscrit que très rarement aux services premium disponibles, et insulte souvent les services qui, proposant un service dégradé au bout d’une période d’ »installation« , fournissent une version premium valorisée. Et en attend une qualité irréprochable, sans aucun sens des réalités. Tous ces éléments cumulés expliquent le décollage un peu lent du SN en France, sur des outils français, et la part de marché non négligeable prise par les concurrents étrangers.

ethics

Investissez donc le SN (viaduc), pensez à faire du prosélitisme, ce n’est pas réservé à une élite, respectez les règles éthiques de base, en ayant également une approche sereine. Allez-y dans l’esprit de donner et de partager avant de recevoir. Vous n’aurez que de bonnes surprises.

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2 Responses to "Réseaux sociaux: pourquoi la France est à la traine…"

  • Alain B. says:
  • Patrick says: